Un Ange est passé !…

Je ne crois pas vraiment aux fantômes ou aux anges… Comme tout un chacun, ensorcelé par nos civilisations ultra-matérialisées.
Difficile d’avouer – même avec toute la bonne volonté possible – que j’ai déjà rencontré fées, elfes et autres figures légendaires des forêts. Soit ! Et pourtant… Les grands champs de forces spirituels qui doivent bien irriguer – qu’on le veuille ou non -notre univers viennent parfois croiser nos pas avec une délicatesse désarmante…

Je me souviens.

Une journée d’hiver, froide, ventée, pluvieuse, brouillardeuse…
Dans un grand massif aux allures lunaires, une longue descente empierrée, calvaire de chevilles…
Le silence, la solitude totale. Soudain, j’arrive à la verticale d’un pas en désescalade de 12 mètres, lisse, sans prise évidente, ni chaines… En bas, une toute petite plate-forme pour “atterrir“ et une mini-sente qui part à gauche en balcon dans la roche… Tout autour de l’à-pic… Je ne me sens pas… Une sourde inquiétude m’envahit. Je me raisonne. Je peux remonter – 2 heures – et basculer sur l’autre versant de la montagne pour rejoindre la ville par une sage piste. Je peux utiliser ma corde même si je ne trouve pas à première vue de point d’accroche solide.
Alors, je reste là, debout immobile, planté comme si j’allais devenir un arbre. J’attends un je ne sais quoi dans ce grand vide minéral où la dernière présence humaine croisée remonte à plusieurs heures. C’est là que, totalement improbable, venu de nulle part ou plutôt des nuages, un jeune adulte en short et tee-shirt aux longs cheveux bruns bouclés surgit, trottinant, puis s’immobilise à mes côtés. Il me dévisage avec un pointe de malice, me salue et me lâche un goguenard mais énergique : – « Eh ben alors ?! » Je reste sans voix pendant qu’il attaque déjà – sûr de lui, le geste précis – le pas et me montre la voie en ralentissant (comme s’il voulait me laisser le temps d’imprimer ses prises et sa manière d’aborder cette petite difficulté).
A peine ai-je le temps de revenir sur terre que je le vois en bas toujours aussi souriant m’apostrophant à nouveau « – Je vous attends ou ça ira ? ». Un poil vexé, j’épuise mes doutes et me lance à mon tour veillant, le plus concentré possible, à suivre sa trace invisible. Quand je pose mes pieds sur la plate-forme aussi content de moi que toujours un peu troublé et que je me retourne avec la volonté de le remercier, plus rien à l’horizon…
Un ange est passé !

Je me souviens encore…

Parti un autre matin d’hiver à l’assaut dans les collines d’une admirable chapelle romane en ruines et oubliée des âges, je décidai de m’accorder, arrivé à ses côtés, un déjeuner frugal. Après quelques recherches, je me décidai pour un petit morceau de terrain en contrebas exposé en plein soleil et disposant d’un morceau de roche bien droit et accueillant sur lequel je pourrai poser mon sac et ma…tête. Repu, je prends le temps de m’allonger pour un “bain“ de soleil aussi serein que silencieux, à peine grisé par la dégustation – raisonnable – d’un rosé de Provence. Au réveil de cette sieste tout en lâcher-prise, je me prends à vouloir en savoir un peu plus sur cette église médiévale et découvre alors sur le guide régional que je suis en fait allongé sur une tombe et que le rocher qui a soutenu ma tête en est la stèle…
En chaque marcheur trottine un pèlerin.
Paix à son âme…

Et encore, je me souviens…

Un jour de premier Printemps tout en pluie soutenue… dans une colline encore inconnue à mes pieds. Je chantai, comme souvent, à tue-tête des extraits un peu brouillons de psaume. Avec une majestueuse envie : rendre grâce à cette pluie pour la joie qu’elle m’apportait. Tout à mon euphorie, je me surpris à me sentir tout-puissant comme si je pouvais faire apparaître d’un seul revers de l’œil ma première volonté. Et alors que je n’avais pas croisé la moindre âme qui vive depuis 6 h, je me dis que j’aimerais bien croiser quelques chevreuils en goguette qui viendraient parfumer ma solitude… Il n’y avait pas 5 minutes que je m’étais rempli de ce cette envie, que je vis débouler à grand galop mais à bonne distance 3 femelles qui traversèrent mon champ de vision.

Ainsi soient-ils !